N3rdistan : Fief du lyrisme engagé

De nature calme, Walid Benslim dégage une sérénité touchante. Lorsque nous l’avons rencontré à la 16ème édition de L’Boulevard, rien ne nous laissait croire que le garçon, aux cheveux frisés et au sourire placide qui se trouvait devant nous, avait fait ses premières armes dans des formations de métal et de rap.

Invitation ouverte à un espace sans frontières

Pendant les concerts, Walid Benslim et son groupe prennent la main du public et le mènent dans une contrée où l’amour est une religion et l’art du mot une offrande sacrée : le Nerdistan. Les machines et le chant de Widad Broco, présence féminine du groupe, accompagnent la douce entrée dans ce territoire imaginaire aux frontières ouvertes.

Dans le vestibule du Nerdistan, musicalités multiples résonnent. Sur fond d’électro, rap, rock et hip-hop sont en osmose avec des paroles recherchées. Ce territoire imaginaire a pour manifeste l’appel à la paix. Les refrains sont scandés en arabe, mais le message n’en demeure pas moins universel.

Walid Benslim du groupe N3rdistan  © Mehdi Drissi / ONORIENTOUR

Walid Benslim du groupe N3rdistan © Mehdi Drissi / ONORIENTOUR

Quand la particule « Istan » renvoie à la notion du territoire en persan, le terme « Nerd » désigne une personne passionnée par le numérique. Qualifiant toute une nouvelle génération dont Walid fait partie, le « numérique » confirme l’inscription du groupe dans une ère où il est enfin possible de se détacher d’oeillères pour accéder et faire véhiculer la culture en utilisant les évolutions technologiques .

Celle à laquelle invite Nerdistan est résolument mystique.

A la quête de la liberté

L’univers sonore de Nerdistan est atypique. Doté de musiciens multi-instrumentalistse, Benjamin Cucciarra (à la Kora et la flûte peule) et Nazim Moulay (à l’udu et au zarb), le groupe crée une ambiance rythmique envoûtante. Les titres s’enchaînent et entraînent dans un itinéraire presque spirituel.

Les textes poétiques, très justement choisis, sont puisés dans l’héritage littéraire arabe et permettent une évasion hors des temps présents. Les référentiels sont divers : Abu Baqa al Rundi, Nizar Qabbani, Gibran Khalil Gibran, Ahmad Matar, Mahmoud Darwich… sont tous des figures emblématiques dont l’œuvre a été reprise et adaptée par le groupe.

Chantant l’amour et la beauté, les rimes dont on se délecte interrogent l’existence. Néanmoins, la récurrence de chansons à caractère militant confirme le sens de l’engagement du groupe et ses préoccupations politiques. La question palestinienne revient ainsi dans bien des textes adaptés.

Enfin, la prestation est complète et apporte une attention méticuleuse à chaque étape de la création. La conception des vidéos de leurs clips et leur performance scénique ne passent pas à la trappe et permettent au public de transcender le premier niveau de textes intelligibles.

Un attachement fort au L’boulevard

Le lien de Walid avec L’Boulevard ne date pas d’hier. En 2001, il se produit sur la scène Tremplin du festival dans le cadre de son groupe de rap ThugGang.

« Nous avons une relation particulière avec L’boulevard. Ce sont eux qui font exister la scène marocaine », nous confie Walid en nous relatant l’anecdote de son départ en France avec Widad. En effet, avant leur vol, Hicham Bouhou, co-fondateur du L’Boulevard a insisté pour qu’ils poursuivent leur pratique musicale et leur a demandé de « ne surtout pas laisser tomber ».

Il  reviendront donc en 2007 avec Nazim représenter leur nouveau groupe de rap-métal oriental, Celsius.

Depuis, le parcours du groupe a été jalonné de différentes expérimentations. De voyages en formations musicales, Nerdistan s’est laissé enrichir d’influences diverses qui garantissent sa maturité artistique.

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